Movies < Critiques Asie < Hard Boiled



Réalisateur John Woo
Acteurs Chow Yun-Fat, Tony Leung Chiu Wai, Anthony Wong, Teresa Mo, Philip Kwok 
Genre Polar Wooien
Titre français A toute épreuve
Durée 2 heures 

Bon, ça y est , les choses sérieuses commencent, fini la rigolade, ça faisait longtemps qu'il aurait du être là. Aujourd'hui, lundi 2 juin 2003, 22h48, un énorme vide est comblé. On vous a parlé d'une ribambelle de films asiatiques, sans jamais évoquer les John Woo. Maintenant en pleine possession de nos moyens, nous nous attaquons aux sommets du cinéma. Jje vous parlerai aujourd'hui du  culte "Hard Boiled" (ou "A toute épreuve" en français). Je ne vous cacherai pas que je considère ce film comme étant un des meilleurs polars jamais réalisés . Alors désolé si je m'emporte un peu, mais "Hard Boiled" en vaut la chandelle, indubitablement. Rangez tous vos polars au placard, et oubliez tout ce que vous avez vu, car vous n'avez rien vu. 

John Woo, ça vous dit sûrement quelque chose. Réalisateur mondialement connu, tout le monde pourra vous citer ses oeuvres : Volte Face, chasse à l'homme,  Broken Arrow, Mission Impossible 2, Windtalkers.... mouais, bof on va dire. Ce que beaucoup de gens ne savent pas, c'est que John Woo a connu une carrière à Hong Kong tout à fait magistrale. En effet, à par Volte Face, les autres films américains de John ne sont guères fantastiques. Le but est ici de vous montrer que John Woo sait faire (ou savait faire) beaucoup, beaucoup, beaucoup mieux. Ce cher John est donc à l'origine de films extraordinaires et à créé un genre à lui tout seul.  C'est simple, toute l'industrie du polar de Hong Kong (ou presque) repose sur les bases fondées par John Woo. J'espère que maintenant vous vous rendez compte du phénomène. Les films hong kongais de John Woo ont été copiés et recopiés jusqu'à plus soif par un nombre incalculable de réalisateurs du monde entier (demandez un peu à Tarantino ;) Et le plus incroyable, c'est que personne (ou presque, il ne faut pas exagérer) ne connaît les grands films de John Woo. Ne vous inquiétez pas, bientôt (lorsque vous aurez fini de lire cette page, pour être plus précis) vous vous ruerez dans le magasin le plus proche pour acheter "Hard Boiled".  Bon, d'accord, c'est vrai que niveau objectivité, on a fait mieux, je vais donc essayer de me calmer, et de vous parler du film.

John Woo était donc un éminent réalisateur de Hong Kong dont la renommée ne cessait de croître, si bien qu'Hollywood commençait à s'intéresser à John, qui bien sûr était attiré lui aussi.  On ne peut pas réellement lui en vouloir, surtout qu'à l'époque, l'avenir du cinéma à Hong Kong était incertain (Hong Kong allait être récupérée par la Chine), et beaucoup sont partis (Tsui Hark, Ringo Lam, ...). Aller travailler à Holywood  est une opportunité qui ne se loupe pas, et à plus forte raison pour un réalisateur asiatique. Toutefois, John aime profondément Hong Kong et avant de partir, il décide de réaliser un dernier film, une sorte d'adieu/hommage à Hong Kong, mais qui lui ouvrirait par la même occasion les portes d'Hollywood  en grand. Au bout du compte naît en 1991, "Hard Boiled", tout simplement le film le plus stylé au monde. Pitié John, reviens!! 

L'histoire se déroule donc à Hong Kong, dans les années 90, et il ne fait pas bon vivre dans l'ex colonie britanique. En effet, le taux de criminalité est extrêmement élevé, trafics d'armes, guerres des gangs, voilà le quotidien, et les forces de police ont beaucoup de mal à faire face. Tequila (Chow Yun-Fat) est un de ces flics, sa particularité vient de ses méthodes, pas très catholiques (une sorte d'inspecteur Harry chinois), il combat le mal par le mal, et ça marche, mis à part le fait que son patron n'approuve pas vraiment. Cependant, un jour, le coéquipier et ami de Tequila se fait tuer lors d'une violente (et magistrale ^^) fusillade. Tequilla met donc un point d'honneur à stopper le chef de gang le plus dangereux du milieu, un dénommé Johnny (Anthony Wong). Il se heurte à un de ses nouveaux tueur, un certain Tony (Tony Leung), as de la gâchette qui l'épargne mystérieusement. Je ne vous en dit pas plus, je vous laisse apprécier pleinement ce chef d'œuvre.

Toutefois, j'attire votre attention sur le fait que le scénario n'est pas le point le plus important du film, même si, rassurez vous, il est rondement mené. Le film est avant tout un exercice de style sublime. Les gunfights ( fusillades ) sont incroyables et les personnages extrêmement charismatiques. Il est indéniable que John Woo est un maître en la matière. Personne ne peut filmer une gunfight avec autant de grâce, de style, de lyrisme et de violence que lui. On assiste non plus à une bataille aux armes à feu, mais à un ballet somptueux où les personnages plongent, roulent, esquivent au ralentit en semant la mort, une arme dans chaque main. C'est ce que l'on appelle le style John Woo. Un des seuls réalisateur qui réussit à rendre une scène ultra violente aussi belle que sanglante. On s'extasie à chaque instant devant tant de trouvailles qui donnent au film une aura, une carte de visite, un tampon John Woo, gage de qualité certain. Il suffit de voir la scène de la maison de thé pour comprendre...  john Woo est sans aucun doute le meilleur réalisateur de gunfight au monde, et il n'hésite pas à nous le rappeler en inventant des nouveaux procédés tous plus fous les uns que les autres, par exemple, "Hard Boiled" est un des seul (si ce n'est le seul) film d'action ou l'on peut voir un plan séquence d'une gunfight (qui dure 3 minutes si je me souviens bien). Tout simplement incroyable. Mais on ne peut pas seulement attribuer à John Woo les meilleures gunfights du cinéma. Il est aussi un des seuls réalisateurs qui puisse donner à des détails une importance stylistique énorme. Ainsi, une simple paire de lunette, une allumette ou encore un oiseau en papier peuvent émerveiller le spectateur en prenant une importance gigantesque (tout en restant un détail). Cela peut paraître fou, et il faut le voir pour le comprendre. Prenez la scène de la maison de thé par exemple, quel détail reste t-il après les 12 minutes de fusillade? L'allumette dans la bouche de Chow Yun-Fat! Des tout petits détails mais qui donnent aux personnages une consistance, un style unique, une âme et les rendent par la même occasion inoubliables. De ce point de vue, "Hard Boiled" est le film le plus représentatif du style de John Woo, qui se donne littéralement corps et âme dans son film. Ainsi, "Hard boiled" véhicule également les thèmes chers à John Woo, tel que l'amitié, la loyauté, ou le sacrifice. Pour ça vous pouvez me croire, le film est un pur recueil de morceaux de bravoure inoubliables. En un sens, Hard Boiled peut être qualifié de "Best of John Woo"... 

J'en vient donc à vous parler des personnages, car il s'agit ici aussi d'un des points majeurs du film. "Hard Boiled" repose sur deux énormes piliers, deux monstres du cinéma asiatique: Chow Yun-Fat et Tony Leung. Le duel entre ces deux acteurs est une pièce maîtresse du film, leur simple présence justifie la vision du film. Il faut dire que ce ne sont pas des débutants. A ma droite, Chow Yun-Fat (anciennement l'acteur fétiche de John Woo), un des acteurs les plus important de Hong Kong, que vous avez certainement déjà remarqué  dans "The Killer", "Le syndicat du crime" ou encore "Tigre et Dragon" (pour citer les plus connus), d'ailleurs, le succès des films de John Woo provient également de Chow Yun-Fat qui marque les esprits dans chacune de ses apparitions. Son personnage, Tequilla est très éloigné du tueur classe de "The Killer", il se rapproche plus d'un héros de film américain, une sorte de mix entre l'inspecteur Harry et John Mac Clane. Néanmoins, rassurez vous, il n'en perd pas moins sa "cool attitude" légendaire. A ma gauche, Tony Leung, qui a récemment fait parler de lui avec sa performance plus que remarquée (prix d'interprétation masculine à Cannes) dans "In the mood for love" de Wong Kar Wai. Tony Leung incarne ici un de ses meilleurs rôles. Et même si on est face à un film d'action pur et dur, on ne peut que remarquer ses performances hallucinantes. Il en volerait presque la vedette à Chow Yun Fat et je ne vous cacherais pas que j'ai été plus qu'ébloui par son jeu d'acteur. Il parvient avec une facilité déconcertante à faire passer la dualité de son personnage, qui est le plus intéressant du film. Ces deux monuments nous offrent donc un duel au sommet savoureux où l'apothéose se situe lors du cultissime "mexican stand off" cher à John Woo. A côté de ce fabuleux face à face, les autres acteurs s'ont pas à rougir de la comparaison puisque le bad guy violent et sadique est interprété par Anthony Wong, fantastique acteur de son état qui a joué dans plus de 100 films dont "The mission" de Johnnie To ou encore "Time and Tide" de Tsui Hark (pour vous citer deux de mes coups de coeur).  De même si un tueur marque bien les esprit, c'est bien le borgne, interprété par l'acteur/chorégraphe Philip Kwok (qui a notamment réglé les combats du "pacte des loups" de Christophe Gans) qui fiche la trouille avec sa dégaine impossible et impassible, mais qui révèle bien des surprises. A noter également que John Woo apparaît à deux ou trois reprises dans le film, je vous laisse le soin de le reconnaître.

Le fameux "mexican stand-off" de john Woo

Tout ça pour dire qu'on ne peut pas vraiment s'endormir devant "Hard Boiled", la référence en matière de polar d'action tellement on s'accroche au rythme du film et aux personnages. Le film comporte également nombres de clin d'oeil à certains films d'actions américains de la même époque, à savoir entre autres "Piège de Cristal" ou "Terminator 2", plus ou moins bien exploités . Ce n'est que justice, vu comment les films américains "empruntent" à John Woo. John veut montrer au monde qu'il peut rivaliser aisément avec les gros films d'actions américains, et cela même avec un budget moindre. Mais ça, on le savait déjà. Ainsi "Hard Boiled" est quelque peu calibré pour un public américain (qui n'avait que moyennement apprécié "The Killer") tout en restant profondément John Woo, un réalisateur qui se donne à fond, et qui pousse son équipe à en faire autant (Tony Leung à failli devenir aveugle, Chow Yun-Fat à failli mourir brûlé!) Pour finir, je dois dire que la musique d'un film d'action ne me reste que très rarement dans la tête, mais pour une fois, tout est parfait, le thème musical du film est simple mais efficace, nerveux et intriguant, en clair, diablement efficace.

Lorsque l'on regarde le film et qu'on est pas habitué à ce genre de cinéma, ce qui peut frapper au premier abord, c'est -malgré l'univers réaliste du film- toutes les invraisemblances décelables. Les plus perspicaces ne manqueront pas de faire remarquer, avec un sourire moqueur, que les armes ne se vident pas rapidement (je dirai même plus, les munitions sont illimités!), de même, il est étonnant de voir comment les personnages principaux résistent aux balles alors que les "petites frappes" volent littéralement lorsque Chow Yun Fat ou Tony Leung leur vident un chargeur dans le ventre. Ce côté surréaliste ne se présente pas comme un défaut ou comme un oubli du réalisateur, il est complètement indissociable au cinéma de John Woo. Alors que l'on accepte les personnages volants de "Zu" et les super pouvoirs de "Taï Chi Master", on bute sur la balle en trop dans "Hard Boiled". Il est alors nécessaire de rappeler que Hard Boiled est un film Hong Kongais, et par là aux antipodes des superproductions hollywoodiennes. Et plutôt que de rapprocher Hard Boiled d'un "Heat", on remarquera qu'il possède plus de points communs avec le Wu xia pian (film de cape et d'épée hong kongais, pour donner une courte définition). John Woo transpose juste l'univers dans un contexte actuel urbain, et remplace les sabres par des armes à feu. Les personnages ne sont ni plus ni moins que des chevaliers (et ce point atteint son paroxysme dans "the killer"). Si le Wu xia pian classique a ses chorégraphies diaboliques, John Woo a des gunfights renversants, alors que Adam cheng a ses épées magiques, Chow Yun Fat a ses doubles berettas toujours pleins. On peut ainsi voir le film comme une transposition du Wu xia pian dans un univers moderne, tout en gardant ses caractéristiques (souvenez vous le combat à un contre cinquante dans l'entrepôt...). Il est important de voir ses films avec cet angle de vue, sous peine de ne pas l'apprécier à sa juste valeur. Etant pleinement habitués au films occidentaux, nous sommes habitués à des scènes peut être plus réalistes, mais ô combien moins impressionnantes, vu que chaque (rare) petit excès doit être accompagné de sa justification. John Woo, lui fait du "Neo-Wu xia pian" (si vous me permettez l'expression), et il est alors libéré, il peut laisser libre cour à son imagination et nous montrer des scènes toutes plus folles les unes que les autres. C'est ce qui donne cette aura à ses films, et qui leur confère cette puissance. Et c'est aussi la recette de son succès à travers le monde. 

Enfin, revenons sur Terre, et à notre critique  de "Hard Boiled", j'espère sincèrement que je vous ai donné envie de voir (ou revoir) ce chef d'œuvre. Si vous prenez autant de plaisir à le voir que j'en ai eu pour écrire cet article alors ma mission aura été accomplie. Je n'ai pas été très objectif il est vrai mais je ne trouve définitivement pas de défauts a ce film. Pourquoi acheter "hard boiled"? C'est simple, pour son réalisateur magistral, pour son scénario mettant face à face deux légendes vivantes de Hong Kong, pour son style inégalable, pour ses gunfights de toute beauté, pour son méchant sadique, pour la scène de la maison de thé, pour son rythme à toute épreuve (un petit jeu de mot ne fait pas de mal) et pour finir, pour son édition dvd ultime que nous a sorti HK édition! Ne vous privez pas : le film le plus stylé au monde est à votre portée, alors foncez, vous ne pouvez pas être déçu. Ou alors, je me fais moine Shaolin et je pars chasser les démons dans les lointaines montagnes de Zu...


Aoshi

Webmasters : Tequila et Aoshi
copyright "The World is yours" 2004

Designed by Aoshi & Tequila